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PrÉSentation

  • : La Page de Reginelle
  • : Ce blog est une invitation à partager mon goût pour l'écriture, à feuilleter les pages de mes romans, à partager mon imaginaire. Des mots pour dire des sentiments, des pages pour rêver un peu.
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Texte Libre

Création d'un FORUM
 
Naissance du forum "Chaque être est un univers", ici à cette adresse :
 
 
Créé en collaboration avec Feuilllle (dont je vous invite à visiter le Blog – voir lien dans la liste à gauche). Tout nouveau, il n'y a pas grand-chose encore, tout juste référencé... il ne demande qu'à vivre et à grandir. Chacun y sera le bienvenu.

Et puis, j'ai mis de l'ordre dans les articles, au niveau de la présentation... ça faisait un peu fouillis ! Quoique… je me demande si c'est mieux maintenant ! On verra bien à l'usage.
Alors maintenant, voyons ce que ce Blog vous offre :

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3 novembre 2007 6 03 /11 /novembre /2007 15:02



            - Pierre ! Tu avais promis de m’accompagner au vernissage de Léo !
- Oui, mais j’ai une urgence, alors entre un malade et une exposition de toiles qui seront encore là demain…
- Avec toi, c’est toujours pareil !
            Faire la sourde oreille seulement quelques minutes, le temps qu’une infirmière l’appelle et le délivre d’un front boudeur.
- Et il n’est pas question que je m’y présente seule ! De quoi aurais-je l’air !
- D’une jeune femme terriblement séduisante ! Et puis, seule, je ne crois pas que tu le resteras longtemps.
- Ce qui veut dire ?
- Rien de particulier, sinon que tu as suffisamment de relations pour ne pas redouter la solitude.
- Et cela ne t’inquiète pas ?
- Pourquoi ? Le devrais-je ?
            Béni soit le téléphone…
- Je suis désolé, Sandra, mais je dois y aller.
- Oui, c’est ça ! Sauve-toi ! Et je suppose que tu vas en avoir pour toute la nuit.
            Et bien au-delà encore, si cela ne dépendait que de lui. Du moment qu’il échappait à Léo et sa clique…
- Je le crains, mais toi, amuse-toi et excuse-moi auprès de tes amis.
            Si, en général, prendre la fuite n’était pas un comportement honorable, il y avait quelques occasions où cela devrait être fermement recommandé.
            Et force lui était de reconnaître qu’il en avait de plus en plus souvent envie. Peut-être était-il enfin temps, pour lui, de reprendre ses distances, de ramener cette relation à des proportions moins… moins quoi ?
            Une aventure, et pas davantage, si ce n’était l’évidente volonté de Sandra de la faire évoluer vers une situation plus conventionnelle. Un guêpier dont il allait devoir se tirer au plus vite. Restait à trouver la méthode la plus élégante.
            Si encore elle n’était pas autant douée pour certaines choses, l’affaire serait déjà expédiée et sans effort, mais il avait rarement eu affaire à quelqu’un d’aussi… d’aussi habile. Un réel talent pour enflammer les sens de n’importe quel homme ; sur ce plan-là, il était certain de la regretter, au moins un temps !
            Quel dommage ! Mais aussi, pourquoi les femmes se montraient-elles tellement prosaïques ! Quelques sorties, quelques moments agréables et les voilà déjà à projeter des plans d’avenir. Plans dans lesquels, lui, n’était pas prêt, mais pas prêt du tout, à se laisser intégrer.
            Et surtout pas avec Sandra !
            Mais il ne lui sera pas vraiment difficile de se prétendre très occupé dans les jours à venir, et cela jusqu’à ce que tout danger fut écarté… jusqu’à ce que cette adorable mante religieuse se rabatte sur une autre proie moins rétive que lui.
            Mais en attendant, il n’avait aucune raison de refuser les captivants agréments qu’elle lui offrait.
            En revanche, il y avait certainement quelque chose à faire pour égayer un peu ces couloirs. Qui avait décidé de déposer sur les murs d’un service de pédiatrie une peinture d’un vert aussi déprimant ? Ni tendre, ni acide… non… presque gris ! Et avec ça pour horizon, des gosses malades devraient demeurer optimistes ?
            Il avait été plus qu’agréablement surpris par le modernisme des installations qui n’avaient rien à envier à celles du meilleur hôpital de la capitale. Rien n’y avait été laissé au hasard, sinon, comme pratiquement partout, la décoration.
            Ceux qui étaient supposés y penser avaient montré un manque total de discernement. Ignoraient-ils combien un environnement pouvait se révéler important parfois ?
            Qui aurait envie de rire devant toute cette grisaille ?
            Un bleu indigo… des cascades d’eaux vives sous les teintes flamboyantes d’un crépuscule et… d’où lui venaient de telles images ?
            Ah, oui ! L’incroyable robe de Charlotte !
            Comment se débrouillait-elle avec leur petit inconnu ? S’il s’en tenait au dicton « pas de nouvelles, bonnes nouvelles », il n’y avait pas lieu de se tourmenter à ce sujet... À moins que… Lui avait-il bien indiqué comment le joindre si l’état de l’enfant le nécessitait ? Il ne savait plus… Et était-il prudent de lui en confier la garde ? Ne s’était-il pas dégagé trop vite d’une éventuelle responsabilité ? Mais pouvait-il agir autrement ? Entre le cabinet, l’hôpital et les visites à domicile, il avait si peu de temps à lui ! Comment veiller sur un petit garçon malade ?
            Non, le transporter chez cette jeune femme avait été la meilleure solution. Et puis, elle n’était pas seule… et il lui suffisait de s’y arrêter avant de rentrer chez lui… en fait, dès qu’il en aura fini ici.
            Mais dans l’immédiat, un autre cas l’attendait et bien plus grave qu’un mauvais rhume. S’il ne trouvait pas très vite ce qui perturbait profondément une petite fille obstinément muette, toute recroquevillée sur elle-même, et refusant de s’alimenter, ainsi que le moindre contact avec autrui… Comment parvenir à l’atteindre ?
            Voilà une dizaine de jours que cette gosse leur était arrivée et depuis il n’avait abouti à rien.
            Une fillette apparemment choyée… d’ailleurs son corps ne portait aucune trace de coup, aucune marque qui aurait pu trahir de mauvais traitements. Des parents ordinaires, inquiets comme tous les parents du monde, et sincèrement dépassés par la situation.
            Et surtout incapables de lui fournir une quelconque information sur un possible traumatisme psychique. À moins qu’il ne faille en rechercher les causes en dehors du cercle familial. Mais les nombreuses entrevues avec son institutrice et ses petites camarades de classe n’avaient rien donné à ce jour.
        Combien la fragilité de l’esprit pouvait s’avérer plus redoutable que celle du corps pour un médecin !
            Un organe défaillant, un os cassé… ou même un virus quelconque… c’était du tangible, mais comment cerner la blessure de l’invisible ?
            Il ne se supportait pas impuissant face à une douleur bien plus bouleversante pour être silencieuse.
            L’absence de tout phénomène pathologique l’avait amené à supposer, tout d’abord, qu’il se trouvait confronté à une forme sévère de l’autisme… mais depuis quelques heures il ne saurait définir pourquoi il n’en était plus du tout convaincu. Quelques détails infimes… presque rien…
            Ce dont il était persuadé, en revanche, c’était qu’ils devaient agir vite… très vite ! Avant que cette gosse ne se referme totalement sur elle-même… avant qu’elle ne se perde dans un univers parallèle.
            Une chambre moins anonyme que les autres. Peu à peu, depuis la veille, avec l’aide des infirmières, il créait pour une gamine inconsciente un environnement de couleurs et de sons. Il avait suffi de draps fleuris, de poupées sagement assises sur une commode, de rideaux au tulle brodé de chats espiègles courant après une balle, d’un petit poste jamais éteint… et de plusieurs voix se relayant pour la lecture des pages d’un conte pour enfant.
            Et c’était à son tour de prêter la sienne à divers personnages, thérapeutes inattendus contre une maladie indéfinie.
            Seulement le temps de défaire un paquet, de brancher un lecteur de disque et d’y insérer un cercle brillant, de régler le volume des haut-parleurs…
- Où que tu sois, ma puce, je suis certain que tu vas aimer cette histoire… Celle d’une fille aux yeux d’émail. Des yeux presque aussi beaux que les tiens… Écoute, écoute bien… il était une fois, il y a longtemps… très longtemps… tu n’étais pas encore née… une merveilleuse jeune fille qui s’appelait Coppelia…
            Hoffmann et Delibes… des mots sur quelques notes… un conte perché sur une musique dansante…
            Et un léger frémissement de deux fragiles paupières closes sur un monde invisible.

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