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PrÉSentation

  • : La Page de Reginelle
  • : Ce blog est une invitation à partager mon goût pour l'écriture, à feuilleter les pages de mes romans, à partager mon imaginaire. Des mots pour dire des sentiments, des pages pour rêver un peu.
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Texte Libre

Création d'un FORUM
 
Naissance du forum "Chaque être est un univers", ici à cette adresse :
 
 
Créé en collaboration avec Feuilllle (dont je vous invite à visiter le Blog – voir lien dans la liste à gauche). Tout nouveau, il n'y a pas grand-chose encore, tout juste référencé... il ne demande qu'à vivre et à grandir. Chacun y sera le bienvenu.

Et puis, j'ai mis de l'ordre dans les articles, au niveau de la présentation... ça faisait un peu fouillis ! Quoique… je me demande si c'est mieux maintenant ! On verra bien à l'usage.
Alors maintenant, voyons ce que ce Blog vous offre :

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3 novembre 2007 6 03 /11 /novembre /2007 15:11



            - Marraine ? Je peux ?
- Bien sûr... Entre ! De toute façon tu es là, non ?
- Ça fait plaisir ! Je vois que le médecin ne s’est pas trompé : tu vas beaucoup mieux !
- Un idiot qui ne comprend rien à rien ! Et mes pommes ? Toujours accrochées aux branches ?
- Sauf celles qui ont préféré faire un tour au ras du sol. J’ai demandé au Baptiste de s’en occuper.
- Donne-lui une bouteille d’Eau-de-vie, mais pas une des vieilles, une de l’année dernière. Et seulement quand il aura fini !
            Au cas où il la viderait avant d’achever son travail. Sacrée bonne femme !
- Pour les châtaignes, c’est terminé.
- Combien ?
- Je ne sais plus... Une vingtaine de sacs pour la parcelle du bas, et quarante-cinq pour celle au-dessus de la Glueyre. Il faudrait abattre deux arbres, ceux à l’entrée du clos, ils ne donnent rien et...
- Non, ceux-là, tu ne les touches pas ! Alors seulement soixante sacs ? Bien la peine de se casser les reins pour les remplir ! Belles ?
- Oui...
- Pour ce que tu y entends ! Rien ne se fait comme je le veux... Il faut que je sorte d’ici ! 
- Justement, tu le peux et c’est ce qui m’emmène si tôt. Que dirais-tu de... De t’installer quelques jours chez moi ?
- Avec toi ?
- Ben… du fait que je n’ai pas l’intention de quitter ma maison, tu devras t’y faire !
- Tu ne retournes pas à Montélimar ?
- Non.
- Ah ! Et le Jacques ?
- Il t’embrasse.
- Ouais ! Et quand allez-vous vous décider à régulariser votre situation ?
            Lui dire qu’il était parti ? Qu’elle n’en ressentait aucune tristesse ? Que, quelque part, elle en était comme soulagée ?
            Charlotte détourna le regard, le laissant se perdre plus bas, dans la cour centrale de l’hospice, glisser sur des silhouettes voûtées, des cheveux blancs, des vieillards, des êtres à la fin de l’existence, et d’autres aussi, jeunes encore mais déjà brisés, les yeux vides et ternes. Des malheureux…
        Pourquoi ? Ils semblaient pourtant presque satisfaits de leur univers.
            Il suffisait de les observer.
            En arrivant, tout à l’heure, elle avait croisé Georges, un compagnon d’enfance, et rien en lui, autrefois, n’aurait permis de supposer qu’un jour il allait se trouver là, seulement inquiet de manquer de papier et de couleurs.
            Il y avait Baptiste, toujours souriant, prêt à se dévouer pour rien, refusant de recevoir la moindre somme d’argent en échange de ses services. À croire que le fait de toucher un billet de banque ou des pièces de monnaie le répugnait, n’acceptant que quelques paquets de cigarettes, des terrines de sanglier ou de chevreuil, des bocaux de confiture, et, à l’occasion, une bonne bouteille de vin ou d’alcool de pommes ou de cassis... Le tout fait maison !
            Et Paul, assis des heures entières sur le muret qui longeait la route, regard tourné vers un monde invisible, celui qu’il portait en lui. Et pourtant, à chaque fois qu’ils se rencontraient, il lui racontait des histoires nouvelles... Des souvenirs de chasse et de pêche. Pour la pêche, il connaissait les meilleurs coins, et les lui livrait, l’un après l’autre ; et il savait, bien à l’avance, comment le temps allait changer.
            C’est lui qui lui avait conseillé de cueillir les pommes. D’après lui, encore quelques répits de soleil, et ensuite il en sera vraiment fini du beau temps ; à l’en croire, l’hiver était déjà là, en embuscade, et il devrait bousculer l’automne, dès les prochains jours. Et celui-là sera rude.
            Ces versants flamboyants, de jaunes, de roux, de verts tendres et sombres, ces murs échevelés de fougères fragiles ou ensanglantés de vigne pourpre : combien de temps avant qu’ils ne s’emmitouflent dans les replis d’un manteau blanc ?
            Et sa rivière ? Combien de temps avant qu’elle ne se taise, muselée par un étau de glace ?
- Alors ? Tu es venue pour moi ou bien... Qu’est-ce que tu regardes ?
- Rien... Georges avec ses crayons... Et Paul... Toujours sur son morceau de mur.
- Des malheureux qui n’ont plus toute leur tête !
            Et voilà, pour elle aussi.
- Peut-être, c’est une façon de voir.
            Que leur avait fait la vie pour qu’ils se retrouvent là ?
- Pour en revenir à Jacques...
- Nous aurons le temps d’en parler. Dis-moi plutôt ce que tu penses de ma proposition.
- Tu comptes rester jusqu'à quand ? Jusqu’aux premières neiges ?
- Plus longtemps que ça. Je verrai. Alors ?
- Eh bien, je ne sais pas... Et qui va se charger des bêtes ? Il y a tellement de choses à faire chez moi !
- Je continuerai à m’en occuper. Après tout, il n’y a qu’un pont à traverser pour aller d’une maison à une autre.
- Plus maintenant.
- Oui, c’est vrai ! J’avais oublié. Aussi quelle idée de vendre ce terrain sans m’en parler !
- J’avais besoin d’argent pour refaire le toit et...
- Nous aurions pu nous arranger. À la limite, je te l’aurais acheté !
- D’abord, c’était au-dessus de tes moyens, et ensuite : j’aurais eu l’impression de te monnayer ton héritage !
- Alors, là, je rêve ! Et où est cet héritage maintenant ? Mais le pire dans cette affaire, c’est qu’en agissant ainsi tu me prives d’un accès direct à la rivière !
            D’ailleurs, tout était en place déjà : en passant devant la maison, elle avait vu des pieux solidement plantés et des hommes déchargeant des rouleaux de grillage. Joli panorama qu’elle allait trouver en rentrant chez elle !
            Et les moutons ! Quel chemin allaient-ils emprunter dorénavant pour retrouver leurs prés. Ils devraient arriver d’un jour à l’autre, les anciens du village avaient déjà ramené les leurs. Le Claude n’allait plus tarder à suivre. Mais lui, il était toujours le dernier à descendre. Il disait à qui voulait l’entendre que, là-haut, il était plus près du ciel et qu’il profitait que les autres étaient partis pour discuter en tête-à-tête avec le Bon Dieu !
            Comme si ce dernier n’était là que pour lui !
- Bon, je dois y aller.
- Qu’as-tu de si urgent à faire ?
- De la pâte de coings. Ils doivent être complètement égouttés à l’heure qu’il est et Chloé doit m’attendre.
- Fais attention : pas trop de sucre et...
- Je sais : bien les passer au tamis pour que la pâte soit la plus fine possible ! Telle que tu l’aimes !
- Et il faut en porter à Marguerite ! Je lui en donne tous les ans. Tu n’oublieras pas ?
- Tu pourras y veiller toi-même. À demain, Marraine !
- À demain, et... Charlotte ?
- Oui ?
- Pour m’installer chez toi, c’est d’accord... Mais, entendons-nous bien, quelques jours uniquement.
- Oh, bien sûr ! Seulement le temps de te rétablir complètement, et j’en suis contente, tu sais.
- Oui, nous verrons !

 

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